Science et purification spirituelle

Conférence prononcée le 16 Aout 2011

Au Durus Mohamedia à Tlemcen

Science et purification spirituelle

Par Mustapha Cherif

La culture Arabe respecte et encourage les savants. « La science et la  purification spirituelle dans la civilisation musulmane» est une question fondamentale. Il s’agit des possibilités de réaliser une civilisation. La civilisation musulmane a atteint la dimension universelle, de par l’articulation entre l’esprit spirituel et l’esprit scientifique. Elle a éclairé le monde durant mille ans, du 1er au 10eme siècle de l’hégire, 7ème au 17ème siècle de l’ère commune.

Les temps modernes n’ont pas pu produire une nouvelle civilisation universelle, malgré tous les prodigieux progrès scientifiques, les améliorations de la qualité de vie et les avancées en matière de droits civiques. Il serait inexact de réduire la modernité au progrès technologique et au commerce, mais dans le cadre du contexte moderne, toutes les cultures et religions ont succombés ou sont marginalisées, pour laisser place à un seul modèle, celui de la marchandisation du monde, notamment suite à la rupture entre science et spiritualité. Le monde vit une crise de civilisation, qui se complique par la mondialisation du Marché. A travers l’histoire, quatre variantes sont recensées au sujet du rapport entre science et spiritualité: conflit, parallélisme, dialogue, intégration.

La religion musulmane reste vivante, mais son niveau civilisationnel a disparu ; les musulmans connaissent des difficultés, faute de renouveau et les sociétés islamiques ne se sont pas suffisamment développées. Il faut s’ouvrir au monde et rechercher ensemble une voie moderne, démocratique et juste.

1-Les caractéristiques de la civilisation musulmane

La civilisation musulmane a comme socle trois valeurs : l’unicité, tawhid, la ligne médiane, wassatiya, et le modèle de la totalité, el insan kamil. Unicité : la clé qui structure l’esprit c’est la profession de foi, la chahada. Sans ce témoignage, purification du cœur et de la raison, il n’y a pas de civilisation islamique universelle. C’est le premier degré de purification. Pour être musulman il faut faire le premier acte de tazkiya, table rase de l’égo, des fausses connaissances et de tous les faux dieux, pour laisser place à Dieu Seul, Celui à qui rien ne ressemble.

Cette trajectoire change toute la situation existentielle de l’être, qui l’assume en toute conscience. Les illusions, les mythes, les risques d’aliénations s’effondrent. Tazkiya, l’esprit spirituel de purification, libère et ouvre grandes les portes de l’esprit scientifique bénéfique. La vie se construit sur la base d’une Norme au dessus de toutes les normes : Seul le Créateur l’Apparent et le Caché, Est. Il intervient dans la vie de l’humanité pour guider.

La deuxième caractéristique de la civilisation musulmane repose sur la dimension médiane wasatiya qui vise l’équilibre. Ses valeurs reposent sur le lien et l’équilibre entre religion et monde, sans confusion, ni opposition. Troisième caractéristique, elle vise la totalité de l’existence, el kamil, et non pas un seul aspect. Elle articule l’individu et la communauté, la personne humaine et l’être collectif, la foi et la raison, la liberté et la loi.

L’acte de purification intervient pour permettre à l’humain de se connaître, de connaitre le monde et connaître le Créateur. Dans ce sens, le Prophète est venu parachever l’éducation humaine. Il recommande de s’élever au degré de ilm at-tazkiya, ilm al-khuluq, ilm as-suluk, ilm at-tarbiya, ilm tarîqa, ‘ilm al-batin ilm al-haqiqa, sciences se rattachant aux dimensions fondamentales éduquer, humaniser et civiliser sur la base de la recherche de la voie qui mène à Dieu. Pour cela le Prophète prescrit: « Adore Dieu comme si tu Le voyais, car même si tu ne Le vois pas, Lui te voit.  » et dans un autre hadith  » Dieu vous a ordonné (kataba) l’ihsan (l’excellence) dans ce que vous entreprenez. »

2-Le rapport Foi et raison

Avec le Coran, nous passons des miracles anciens, à ceux de la Parole révélée, rationnelle, mais aussi symbolique, qui s’adresse au cœur et à la raison, à la Fitra et à son intelligence. L’humanité est considérée avoir atteint l’âge de la maturité : pour toute étape un Livre « li Koli ajalin Kitab » en vue de purifier l’âme humaine. Une des forces du Coran réside dans sa double caractéristique : un Message Total, se suffisant à Lui-même, qui attire l’attention sur le caractère impénétrable de la création, l’Infini, l’âme, l’éternité… et en même temps Livre ouvert, qui appelle au raisonnement, pour parfaire le caractère humain, élever la condition humaine et réaliser une civilisation.

Le langage du Coran s’adresse à la fois aux facultés raisonnables et au cœur de l’homme et de la femme. La foi n’est pas un savoir indépendant du raisonnement. Elle est l’acte réfléchie, raisonnable, capable de porter et de dépasser les autres actes. La raison et la foi, sont toutes deux incontournables, chacune capable de vérité, mais ne se suffit pas à elle-même. La foi permet de prendre conscience que rien n’est donné d’avance, que l’homme est un tout, et qu’il faut trouver la mesure : « Nous avons crée toute chose selon une mesure »

La révélation s’adresse à la raison pour l’éclairer et non pour la contredire. L’éclairer ne signifie pas l’aveugler de sa lumière, mais la réactiver pour lui permettre de discerner le permanent de l’évolutif, le licite de l’illicite, le clair de l’obscur, la relation entre toutes les composantes disparates. Il ne s’agit pas de combler une insuffisance de la raison, mais de la responsabiliser et d’élargir son champ de vision à partir des valeurs spirituelles en vue d’approfondir les qualités humaines.

La civilisation islamique a contribué à l’émergence de la première civilisation universelle, grâce à la priorité donnée à la purification, de l’âme et du caractère, sur la base de la complémentarité entre la connaissance spirituelle et le savoir scientifique. Elle a pratiqué tout à la fois le dialogue, l’intégration et l’indépendance entre science et religion. Elle a apporté des progrès scientifiques décisifs dans tous les domaines, mais surtout a forgé un type d’homme, en accord avec sa conscience, équilibré et total, à l’image du Prophète, qui est à la fois religieux, raisonnable et naturel. C’est cela l’apport de la civilisation qui forme un être scientifique et spirituel.

3-La totalité

Le Coran est clair, le Prophète a pour mission d’éduquer, de libérer, de purifier l’âme humaine, car l’homme le mérite. C’est pour cela que les anges ont reçu l’ordre de se prosterner devant Adam. Aucune science n’est superflue qui aide à se connaitre et à connaitre le Créateur. En l’an 940, deuxième siècle de l’hégire, le penseur Al Farabi fut le premier dans l’histoire à écrire un ouvrage sur l’inventaire de toutes les sciences : « Kitab Ihsa al ulum ». Tous les penseurs, théologiens, al mutakalimum et tous les mystiques, les mutasawifounes, d’Ibn Arabi à Ibn Rochd, d’Ibn Sina à Ibn Khaldoun, tiennent compte et du ilm scientifique et de la spiritualité, de la maarifa pour parvenir à l’ihsan sur la base de la tazkiya. L’islam a ouvert le champ des possibles, l’unité des savoirs, sans limite, ni confusion, d’où le hadith qui dit connais toi toi même pour connaitre ton Seigneur.

Il est inutile de prétendre à une science de l’homme qui ne prendrait pas en compte l’ensemble de nos dimensions, biologique, écologique, psychologique, sociale, religieuse, spirituelleL’humain est la créature privilégiée. Pour le comprendre, l’on ne peut pas opposer le cœur et la raison, le ciel et la terre. Le Coran suggère une compréhension de l’humain, pour stimuler la raison. La science s’avoue incapable de saisir l’ensemble de la réalité humaine, pas seulement l’au-delà du monde. Elle ne peut voir du réel que des aspects, pas le tout. Nous ne pouvons pas tout expliquer. Par l’acte de purification, de l’âme réfléchie, nous nous “impliquons” à des niveaux de sens pour approfondir notre humanité.

Des niveaux qui peuvent être perçus par le vécu, le mystique parle de « dhouk ». Nous ne vivons pas par explication, mais par implication intériorisée et introspection. Se dépasser pour connaitre la voie vers Dieu. L’originalité ce n’est pas d’avoir produit des inventions scientifiques, pourtant majeures. Tout groupe humain peut pratiquer l’exercice scientifique, comme le souligne Ibn Khaldoun : « les sciences rationnelles sont naturelles à l’homme, en tant qu’il est doué de la raison. Elles ne sont pas l’apanage d’une religion particulière.» L’originalité de la civilisation musulmane, à trait au modèle d’être humain qu’elle a produit.

L’essentiel est de parfaire les qualités humaines, pour forger le caractère, à l’image du Prophète, l’Homme total, universel, l’âme étant ici l’élément central, car capable de s’élever. Tazkiya dont l’objectif est l’ihsan, demande des efforts permanents, marqué par les rites fondamentaux comme la prière, salate, jeûne, siyam, don purificateur, Zakat, pèlerinage, hajj, et le repentir, tawba, glorification, tasbih, oraison, dhikr, isolement spirituel, khaloua et ytikaf , actes de biens, mouamalate, et l’autocritique, car faire son examen de conscience est une source de paix intérieure. C’est un tout et un long chemin.

Les soufis l’ont compris et recherchent l’ihsan avec l’aide du maître-éducateur sur la voie, tarîqa, de la purification. Nous ne devons rien négliger, encore moins le raisonnement. Ibn Arabi, imagine un dialogue entre la raison et l’âme. « Tu me négliges dit-la raison à l’âme, prend soin de ton existence. Celui qui t’a donné l’être est ce toi ou un autre ? Médites bien cela et réalise cette vérité. Sers-toi de moi car je suis faite pour cela. » L’âme se mis à réfléchir et reconnue qu’elle a été produite par une autre réalité. Le sommet de la pensée, le raffinement du comportement, les figures emblématique qui représentent le plus l’originalité musulmane dans son intégralité sont les maitres spirituels, les soufis, éducateurs de l’âme.

4- Le savoir spirituel

Le savoir spirituel est une clef fondamentale. El ilm naffaa, le savoir bénéfique élève la condition humain et permet de se connaitre et connaitre un tant soit peu « Dieu ». L’humanisation passe par la voie du savoir spirituel. Le Prophète priait ainsi : « Gloire à Toi ! Nous ne te connaissant pas comme il conviendrait de te connaître. Aucune louange ne t’embrasse. Tu es tel que Tu t’es loué Toi-même et ce qui en Toi est hors d’atteinte » (Muslim salat 222)

Le savoir spirituel pour guider, purifier et éduquer l’âme, est donné par Dieu ; il guide à sa lumière qui Il veut. Le miracle du Prophète consiste dans le fait que le Savoir, le Livre lui a été révélé, comme synthèse finale de la Tradition primordiale. Le Prophète est le guide universel par excellence, définit par le Coran comme doté d’un caractère grandiose. Selon un hadith qudsi le Prophète détient la synthèse des verbes, jawamii el kalam. L’ummiyya du Prophète signifie sa perfection. La recherche guidée de la connaissance au sujet de Dieu aboutie à la sagesse, hikma. Se mettre en quête du savoir de la perfection divine, Kamal, en vue de laquelle Dieu a crée l’homme est le but. Certaines âmes ont reçu une prédisposition à des degrés infinis (1) : « Dieu élèvera de plusieurs degrés ceux d’entre vous qui auront cru et qui auront reçu le savoir. » (S58/V11).

La connaissance de la réalité participe à la compréhension des différentes voies par lesquelles Dieu se révèle. Elle est de deux ordres : scientifique et spirituel. La connaissance de la loi divine n’est jamais en opposition avec le savoir acquis par l’esprit seul. Le maitre spirituel waliou salih, acquiert un degré de connaissance ajouté au degré d’intelligence de l’esprit. Au delà de ce seuil le wali salih, chez qui c’est ouvert un autre œil, examine ce qui se produit dans l’âme que l’esprit ne peut appréhender car elles sont hors de sa portée. (2) : « Seuls craignent Dieu, de tous Ses créatures, les savants. » (S35/V28).

5-L’équilibre

Former un être humain ouvert, équilibré, responsable, en paix avec lui même, producteur de sens, de logique et de justice est le but de la religion qui éclaire la raison. La foi porte en elle l’exigence de la raison et éclaire les limites d’une raison livrée à elle-même. Le dépassement est le travail requis pour remettre sans cesse, en question, à la fois, les prétentions de la foi idolâtre et celle de la raison qui se croit suffisante. La révélation attire l’attention sur le fait que nous avons peu de connaissance, que rien n’est donné d’avance et qu’il faut rechercher avec humilité le savoir pour s’épanouir en tant qu’humain. Réactiver les capacités à adorer Dieu Seul, en responsabilisant l’humain sur la base de la connaissance, afin que son destin de représentant de Dieu sur terre soit assumé. C’est ce que résume l’Emir Abdelkader en disant : « Je ne vois rien, parmi les défauts des hommes, qui ne soit plus graves que l’imperfection chez ceux qui ont le pouvoir d’acquérir la perfection. »

Le savoir coranique vise à ne pas s’idolâtrer et permet de s’arracher à la gravitation matérialiste. La révélation intervient pour donner à penser sur l’homme, l’origine et les fins dernières de la vie. Le chemin passe par la lumière du travail, car une vérité n’est jamais disponible d’emblée. Pour s’accomplir, l’homme doit reconnaitre ce qui le dépasse et qui s’énonce sous la forme de symboles.

La cohérence de l’être humain est essentielle. L’apparent et le caché, la foi et la raison, la loi et le vrai sont liés. Ibn Arabi, dans Futûhât chapitre 262, donne la définition de la Loi sharî‘a et dans le chapitre 263 une définition de la Vérité, haqîqa. « ‘ayn ash-sharî‘a ‘ayn al-haqîqa wa ash-sharî‘a haqq (kulli-hâ), wa li kulli haqq haqîqa ».  Il s’agit d’une seule et même réalité (3) : « C’est Lui qui a envoyé Son envoyé avec la guidance et la religion d’al-haqq pour la faire prévaloir sur la religion toute entière, Et Dieu suffit pour en témoigner. ». Discerner l’apparent et le caché et enrichissant.

La Kaaba cherifa est le symbole du lien entre l’apparent et le caché, batin et dh ahir. Face à la Kaâba le salih contemple et reçoit un flux, une lumière et un son invisible, ils irradient tout son être par le regard intérieur de l’âme. « La Mosquée sacrée », lieu de la louange, de la prosternation et du mouvement cosmique, comme adoration, a une double signification. Temple visible, physique et Temple invisible immatériel, qui se situe dans le cœur du croyant purifié mutatahir. La rencontre des deux totalise le degré de l’adoration pleine. D’où le hadîth qui énonce l’idée que le cœur de l’homme de vérité contient symboliquement le divin, ce que la terre tout entière ne pourrait faire.

Le Prophète est le symbole fort de toutes les dimensions de l’existence, le lien entre dine oua dunya, entre raison et foi, entre le fait révélé et le fait réfléchi, l’apparent et le caché, il est insan al kamil, l’homme total universel, être de raison, être naturel, être religieux. Le Prophète demandait à Dieu : « Fais-moi lumière ».

Le musulman, qui se remet en confiance à Dieu, décrit par le Coran, a pour tâche de découvrir sa nature de créature, de traduire le lien entre dhahir et el batin, pour adorer en vérité Dieu et produire de la civilisation en tant que khalife Allah fi aldre. L’islam propose une civilisation universelle du fait qu’il conçoit l’humain comme un être devant témoigner de sa foi réfléchie. À cette condition, se réalisera le principe coranique lumière sur lumière.

Il est des modes de connaissance accessibles qu’a des catégories spécifiques, comme celui de voir l’invisible et d’entendre l’inaudible, dont le Prophète en est le maitre : (4) « N’as-tu pas vu que les êtres dans les cieux et sur la terre, ainsi que les oiseaux volants en ordre rangé célèbrent la gloire de Dieu ? Chacun d’eux connait son horizon de grâce (sala) et son acte de glorification» Coran 24-41 Dieu s’adresse au Prophète en disant « n’as-tu pas vu » et non pas à nous en nous disant « n’avez-vous pas vu ». La raison en est que nous n’avons pas vu cet acte de glorification, alors que le Prophète, et des êtres mystiques privilégiés, le voit de leurs propres yeux.

6- Conclusion

Le respect du lien entre ses différents niveaux, l’apparent et le caché, la raison et l’âme, le visible et l’invisible, fait défaut en notre temps. La science coupée du sens, de l’éthique, de la spiritualité et des finalités ne nous a pas donné la moindre garantie sur ses utilisations. Des traditionalistes disent qu’il eut fallu que la science ne quitte pas son tuteur religieux ; l’homme moderne pense qu’accrochée à son tuteur religieux la science n’aurait jamais pu fleurir ; ensuite en terme d’éthique, il se dit que toute technique est neutre et que son usage dépend de la conscience de son utilisateur, qui exerce sa liberté vers le bien ou vers le mal.

Que peut-on dire ? L’amputation du sens spirituel, Tawhid, la norme au dessus de toutes les normes, l’évacuation du rapport au mystère, al ghayb, qui concerne l’âme, l’esprit, le cœur, dans un rythme cosmique, ont déshumanisé. L’homme a régressé, réduit à une dimension biologique. Seuls les outils ont changé. Il a presque les mêmes instincts, alors qu’il faut le purifier, le faire évoluer, l’humaniser, le civiliser, l’équilibrer : parfaire son comportement. Les déséquilibres perturbent la société humaine contemporaine. Le musulman d’aujourd’hui n’accorde pas sa place essentielle, ni à la raison, ni à la purification de l’âme. Il y a lieu de renouveler notre regard sur la voie qui mène à la rectitude, à la civilisation, à la réalisation de l’homme total, din wa dunya, ummata el wassate. Il est urgent de se pencher sur nous même, chercher à nous prémunir et guérir de nos propres maux. Par la voie de la Tazkiya, sur la base de l’enseignement du Prophète sera possible le perfectionnement individuel et collectif.

Ce qui reste déterminant c’est l’éducation, allié à la force de la raison. Entre science et spiritualité, les temps actuels exigent de retrouver le lien, dont il faut assurer les mécanismes durant tous les cycles de l’éducation. Susciter la synergie, la cohérence, sans confusion, ni séparation. Tawhid, wassatiya et el ilm nafaa, pour forger un être de la droiture el insan mustaquim, celui du berl agir, el mohsin dans la recherche du bonheur sur terre et du salut dans l’au-delà, le voyage vers Dieu. Le Prophète en faisait l’axe de sa mission : « Dis: Seigneur! Donnes-moi encore plus de savoir ». (S20/V114).

Mustapha Cherif

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