l’Orient et l’Occident

Le Sommet de Durban II à Genève

l’Orient et l’Occident

Par Mustapha Cherif

Il n’y a pas d’alternative à l’amitié et au vivre ensemble. Après la décolonisation de la quasi-totalité des pays du Sud durant la deuxième partie du XX siècle tout le monde espérait un nouvel ordre international fondé sur le droit. Après la fin de la guerre froide en 1989 et les événements de septembre de 2001, chacun peut constater que la barbarie moderne domine. Terrorisme des puissants contre terrorisme des faibles. De plus les grandes puissances ne sont pas quittes avec leur passé et les régimes au Sud instrumentalisent parfois ces pages sombres de l’histoire commune. Comment en finir d’un côté avec la catastrophique histoire coloniale et raciste de l’Occident depuis cinq siècles et de l’autre avec le ressentiment et les surenchères des pays du Sud au sujet des réparations? La conférence de Durban est un test significatif. Les politiques et les intellectuels sont concernés. Comment peut –on ravaler un sujet majeur à des polémiques ? Le traditionnel Forum de la société civile, prévu à la Maison des associations à Genève tente de défricher le terrain avec la participation de plusieurs centaines d’ONG. La question palestinienne et du sionisme tiennent difficilement le devant de la scène. Ce dossier cristallise le plus les clivages. Sur ce point, un abîme sépare l’Orient et l’Occident, les riches et les pauvres, les sionistes et les militants de la paix.

Racisme et discrimination

La mauvaise conscience des Occidentaux et les intérêts étroits qui lient Israël aux puissants bloquent toute perspective d’un nouvel ordre international juste et pacifique. Pourtant, les organisateurs du Forum civil affirment ne vouloir pointer du doigt aucun pays en particulier : « Nous voulons créer un espace libre et ouvert pour tirer les leçons des dérapages de DurbanI, la Conférence sur le racisme de 2001, dont celle de Genève constitue le suivi. C’est un espace de convergence et de dialogue, libre de toute tendance politique. » Le Forum civil donne légitimement la voix aux victimes du racisme et de la discrimination. En plus des plénières, des groupes de travail vont réfléchir au racisme anti-noir, à la discrimination des migrants, des réfugiés, des femmes, des populations autochtones, du peuple palestinien et aux dérapages consécutifs au 11 septembre, notamment les classifications en fonction de l’ethnie et de la religion. Une manifestation est aussi prévue samedi après-midi dans les rues de Genève. Il est impérieux que la défense de nobles causes donne la vraie image des enjeux de manière pacifique et respectueuse du droit à la différence.

Une autre réunion d’une poignée d’ONG alignées sur les puissants et Israël se tient pour faire diversion, et défendre soit disant les droits humains, la tolérance et la démocratie. Ils tentent disent-ils : «  donner un coup de projecteur sur les violations des droits de l’homme les plus graves, comme le génocide rwandais, la Birmanie , l’Iran et l’Egypte… » Certains de ses membres ont appelé au boycott de Durban II. Cette arrogance ne peut cacher le fait que l’Histoire d’hier et la situation coloniale en Palestine ne peuvent êtres occultées, sous prétexte que des  régimes non démocratiques sont visibles dans le tiers-monde. L’archaïsme des régimes arabes ou autres ne peut cacher l’innommable commis à Gaza et les injustices du système international. La publication dans la presse européenne d’une tribune intitulée « L’ONU contre les droits de l’homme » et signée par une série de personnalités partiales et proches du sionisme comme Elie Wiesel, Georges Charpak, Alain Finkielkraut ou Claude Lanzmann est pathétique tant elle révèle leur alignement aveugle sur la politique inique d’Israél, leur haine des musulmans et leur travestissement de la réalité. D’autres intellectuels occidentaux médiatisés, comme Jean François Julliard et Robert Ménard, considèrent que les revendications du Sud relèvent de l’intégrisme, et qu’il faut défendre la liberté de penser. La confusion et le détournement de sens font rage.

Des militants palestiniens pour la paix dans le Comité national palestinien pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions et des juifs, dignes héritiers du judaïsme, ont organisé une Conférence d’examen d’Israël. Ils considèrent que le Forum civil et les pays arabes ont fait trop de concessions, ils déclarent : « Nous avons décidé de créer notre propre évènement parce que le Forum de la société civile ne voulait pas du mot apartheid. Il refusait aussi le terme d’occupation et de colonisation, qui sont pourtant les principales causes du racisme en Palestine. Nous regrettons aussi que la question palestinienne ait été complètement exclue du projet de déclaration finale de la conférence. Nous avons invité des avocats internationaux, israéliens et palestiniens et nous étudions de près l’expérience sud-africaine de lutte contre l’apartheid. » Les peuples ne sont pas dupes, ils savent que ce qui se passe en Palestine colonisée est pire que l’apartheid, ce qui n’est pas dans l’intérêt lui même des juifs.

Normalisation en échange des terres occupées

Le langage  de responsables politiques du Sud donnent de l’eau au moulin de ceux qui ne veulent pas regarder la vérité historique en face. Le président iranien, a qualifié le gouvernement israélien de « gouvernement raciste », mais heureusement il n’a pas nié l’Holocauste ou le droit d’Israël à exister ; et que font les délégués des pays européens, notamment les Français et les Britanniques, qui ne boycottent pas la conférence ?  Ils sortent de la salle et refusent d’entendre un point de vue différent du leur ! Qu’y a-t-il dit de choquant de dire que : « Après la fin de la seconde guerre mondiale, [les Alliés] ont eu recours à l’agression militaire pour priver de terres une nation entière sous le prétexte de la souffrance juive. (…) Ils ont envoyé des migrants… du monde de l’Holocauste pour établir un gouvernement raciste en Palestine occupée. » C’est un point de vue. Des puissances européennes considèrent cela comme « un appel intolérable à la haine raciste » de la part du président iranien, et appellent à une réaction d’une « extrême fermeté ». Il est temps de revenir à la raison, de prendre en considération la proposition arabe qui attend depuis 2002, fondée sur la paix et la normalisation totale en échange des terres occupées par la force en 1967. C’est cela qui devrait retenir l’attention des pays occidentaux. Le Vatican de son côté participe à cette rencontre, son porte-parole a précisé que « le Vatican participe à la conférence car il s’agit, à juste titre, d’une importante occasion de faire avancer la lutte contre le racisme et l’intolérance ».

A quand la fin des cycles des hégémonies ?

La conférence de Genève fut une occasion tragique face au dialogue de sourds. L’occasion ratée de s’attaquer au sujet du racisme et des discriminations dans le monde actuel. Mais ça ne sera pas vraiment le cas, le boycott diplomatique de pays occidentaux servira finalement à reporter le débat sur l’avenir du monde et à diviser encore plus la planète en blocs. Occasion ratée pour tous. Au sein de l’Union européenne c’est aussi la division sur la question de sa participation, et a perdu une occasion d’être pertinente sur l’enjeu politique de reconnaître que la question palestinienne est une affaire centrale, de décolonisation, cela aurait eu l’avantage de faire reculer l’extrémisme en Israël et dans le monde arabe. Les Allemands, les Néerlandais, les Polonais, les Italiens, les canadiens, les américains, les Australiens et évidemment les Israéliens qui ont choisi la politique de la chaise vide, portent une lourde responsabilité au sujet des animosités et retards en matière de dialogue des civilisations et diplomatique entre l’Orient et l’Occident, entre le Nord et le Sud. Jusqu’à quant vont-ils pratiquer la fuite en avant et la loi du plus fort ? La venue  formidable de Barak Obama devrait pourtant donner une autre orientation aux relations internationales. Les peuples veulent se tourner vers l’avenir et vivre ensemble en paix, dans un monde juste. La hiérarchie des cultures, des races et des religions relève de la pratique sauvage et de trahisons flagrantes des valeurs abrahamiques. La sauvagerie de l’ordre dominant et les réactions aveugles des dominés ne peuvent pas perdurer indéfiniment.

Il faut féliciter l’ONU

Que faire pour mettre fin à cette guerre perpétuelle qui ne sert personne, surtout en temps de crise économique qui peut déraper en nouvelle guerre mondiale? La préparation de la rencontre de Genève, et il faut féliciter l’ONU, (et indirectement la Suisse ), d’accueillir cette rencontre, avait pourtant donné lieu à de sérieuses concessions de la part des pays musulmans, aboutissant à un projet de déclaration finale débarrassé des références à la « diffamation des religions » préconisée par l’Organisation de la conférence islamique (OCI), et qui ne focalise pas sur Israël, deux questions qui étaient controversées. A quand la fin des cycles des hégémonies, de la haine et des impasses tragiques? Les peuples ont soif de paix et de justice et refusent tous les extrémismes.

MC est professeur en relations internationales

www.mustapha-cherif.net

2 réflexions au sujet de « l’Orient et l’Occident »

  1. GUERFI

    BIEN CHER PROFESSEUR

    LA PENSEE ISLAMIQUE SE DISTINGUE MERVEILLEUSEMENT DES AUTRES PENSEES DE QUELQUES BORDS QU’ELLES SOIENT

    AU CENTRE DE LA PENSEE ISLAMIQUE L’HOMME RELIE A DIEU

    L’HOMME LA CREATURE DE DIEU A LA FOIS HOMME D’ACTION ET HOMME DE PRIERE DOUE DE RAISON ET DE SENTIMENTS
    CORPS ET AME

    IL NE SAURAIT ETRE HEUREUX SANS ETRE RELIE A SON CREATEUR

    LA NOTION PRIMORDiALE DU BONHEUR INTERIEUR EST A RECHERCHER…

    DIEU A LIBERE SA CREATURE DES ANGOISSES MATERIELLES

    LA PEDAGOGIE ISLAMIQUE DE L’HOMME REPOSE SUR LA SAGESSE ET L’EQUILIBRE DU JUSTE MILIEU

    LA PEDAGOGIE ISLAMIQUE REJETTE LE RATIONALISME SOUVERAIN

    LA PEDAGOGIE ISLAMIQUE EST LIBERATRICE DES ALIENATIONS

    LA PEDAGOGIE ISLAMIQUE EST ACTIVE NUL PLACE AU FATALISME

    LA PEDAGOGIE ISLAMIQUE EST HUMANISTE SON CIMENT EST LA SOLIDARITE

    LA PEDAGOGIE ISLAMIQUE EST UNIVERSELLE ET UNIVERSALISTE
    ELLE CROIT AU POUVOIR DU DIEU JUSTE SUR LES HUMAINS

    LES PRINCIPES DE LA PEDAGOGIE ISLAMIQUE PUISENT LEURS MOYENS D’ACTION ET DE LIBERATION DE LA VERITE REVELEE

    LE SENTIMENT DU SACRE NOUS INSTRUIT POUR MIEUX ETRE ET AGIR

    LES PEDAGOGIES DOGMATIQUES AUTORITAIRES LIMITENT L’ACTION DE L’HOMME ET ETOUFFENT SON ESPRIT CRITIQUE

    HEGEMONIES ET GENOCIDES..
    DEHUMANISATION DE L’HOMME ET NEGATION DE DIEU
    ANTAGONISMES ET CONTRAINTES…
    FAMINES ET MALADIES…

    ON PEUT LES RECONNAITRE PAR L’EVEIL DES SENS ET LA PRATIQUE DES SCIENCES !

    ORIENTALE ET OCCIDENTALE
    JE CROIS EN DIEU
    JE CROIS EN L’HOMME

    AMITIES BIEN FRATERNELLES

    AMANE GUERFI

  2. Mohammed

    Cette sacralisation de la souffrance du peuple juif très souvent relayée par certains intelectuels juifs tels que Lanzmann ou Elie Wisel(Seul Prix Nobel de la paix á avoir été en faveur d´une guerre et de l´invasion de l´Irak par les États-Unis)empèche en Occident l´éclosion de toute reflexion saine sur la question palestinienne et de trouver une solution à leur tragédie. Il est pratiquement impossible de faire figurer le mot israel et discrimination ou racisme sans que l´on ne se fasse taxer d´antisémite. D´oú une question qu´il me vient à l´esprit Dr Cherif, pensez vous qu´une véritable pression économique exercée par les pays arabes disposant de reserves économiques importantes en Occident pourraient ou devraient les utiliser afin de contraindre les puissances occidentales à faire un effort suplémentaire en faveur des palestiniens par exemple?
    Salutation fraternelles,
    Mohammed

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